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Utilisation abusive des SPV : Trop c’est trop —-> SUD SDIS69 dépose un recours

Parceque nous estimons que la sécurité  individuelle défaillante d’un sapeurs pompiers peut impacter dangereusement la sécurité collective d’un équipage, SUD SDIS 69 a déposé un recours au tribunal administratif .

En effet , malgré des alertes officielles aux autorités du SDMIS (Prefet, PCASDMIS, Direction), absolument rien n’a été mis en oeuvre.

Nous estimons donc aujourd’hui que l’ensemble des pompiers y compris les SPV :

– doivent respecter  des repos sécurités avant et après leurs activités professionnelles principales,
– ne doivent pas dépasser 2256h annuels tout compris,
– ne pas dépasser 48h hebdomadaire,

Ces dispositions existent déjà pour les SPV/doubles statuts et SPV/PATS.

Il s’agit des garanties réglementaires des travailleurs  listées dans la directive européenne 2003-88.

Notez qu’il n’y a plus aucun doute sur la qualification des SPV en travailleurs.

Certaines personnes estimeront que le système actuel est en danger… Pour SUD, nous estimons que le système actuel à dérivé vers une exploitation des SPV au détriments de l’emplois des SPP mais surtout de la sécurité  de tous.

Nous n’évoquerons pas ici le volet rémunération qui lui aussi est en cours d’instruction au tribunal administratif de Lyon, en effet plusieurs sapeurs pompiers volontaires de l’Ain et du Rhône ont déjà déposé une requête en ce sens.

Ceci étant précisé, nous restons à votre disposition pour échanger sur ce sujet : spvmatzak@sudsdis69.fr

 Rappel en vidéo de nos positions.

 

 

Rappel de l’arrêt Matzak

Le 16 décembre 2009, un pompier volontaire, entré au service de la ville de Nivelles le 1er aout 1980 et devenu sapeur pompier volontaire un an plus tard, a intenté un procès à sa commune pour obtenir une indemnisation de ses services de garde à domicile qu’il considère comme du temps de travail.

Le 22 mars 2012, le tribunal du travail de Nivelles a « en large mesure accueilli le recours de M. Matzak » (point N° 19 de l’arrêt). La ville de Nivelles a alors fait appel devant la Cour du travail de Bruxelles.

Par un arrêt du 14 septembre 2015, cette juridiction a partiellement fait droit à cet appel.

En ce qui concerne la rémunération réclamée, elle a posé des questions préjudicielles à la Cour de justice.

La cour de justice européenne a rendu sa décision le 21 février 2018.

Elle reconnait à tous les sapeurs-pompiers volontaires un statut de travailleur et considère que les « gardes à domicile » (astreinte) pendant lesquelles, ils doivent répondre à une sollicitation dans un délai de 8 minutes, sont des temps de travail.

En revanche la Cour de Justice Européenne (CJUE), déclare l’Europe incompétente pour fixer le niveau de rémunération d’une astreinte et laisse cette compétence aux états membres.

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En attente de réponse du SDMIS et de Monsieur le Préfet….

Conscient des impacts possibles pour tous les sapeurs-pompiers du Rhône et de la Métropole de Lyon, deux courriers d’alerte ont été adressé en recommandé avec accusé de réception aux autorités de tutelle du SDMIS, en date du 19 mars 2018. Voir en fin d’article les liens pour lire ces courriers.

Il a été demandé que :

  1. « dans l’attente des modifications législatives française nécessaires pour officialiser le statut de travailleur des sapeurs-pompiers volontaires, que des mesures immédiates soient prises pour qu’aucun sapeur- pompier du SDMIS ne puissent y travailler sans avoir pu bénéficier de l’effet de l’ensemble des dispositions de la directive européenne 2003/88« ,
  2. « tous les sapeurs-pompiers volontaires du SDMIS soient informés des droits que confère la directive européenne aux travailleurs, en matière de santé et de sécurité, notamment en ce qui concerne le travail de nuit et qu’ainsi, dans l’attente de la modification des textes, il puissent apprécier les risques qu’ils encourent et donner un consentement éclairé, même tacite« ,
  3. « soit officiellement ouvert, au niveau du SDMIS et de l’Etat, des travaux destinés à respecter le droit européen, en ce qui concerne le statut des sapeurs-pompiers volontaires« .

En conclusion il a été rappelé le 4ème considérant de la directive 2003/88 :

L’amélioration de la sécurité, de l’hygiène et de la santé des travailleurs au travail représente un objectif qui ne saurait être subordonné à des considérations de caractère purement économique.

 

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Des réactions timides voire hostiles…..

 

La FNSPFLa fédération des Sapeurs-pompiers de France n’a pas réagit officiellement, plus d’un mois après la sortie de l’arrêt et plus de 8 mois après la parution des conclusions de l’avocate générale, qui préfigurait l’arrêt Matzak du 21 février 2018. Tout au plus, une communication indirecte « via le réseau fédéral » (tant pis pour ceux qui n’en font pas partie), a été faite fin février 2018. Son président est inquiet sans l’être. Il est inquiet si « personne ne réagit« , et ne l’est pas « si une réponse politique forte de la part du gouvernement (ainsi que des autres gouvernements européens, pour la plupart concernés par la présence de SPV dans les effectifs de sapeurs-pompiers) et des élus gestionnaires des SDIS arrive à exclure définitivement les volontaires du champ d’application de la directive« . Bref ce n’est pas d’un enthousiasme délirant.

Et la France, quelle est sa position ?

Selon la Direction des Affaires Juridiques (DAJ), « Les autorités françaises avaient notamment invité la Cour à répondre aux questions posées par la juridiction de renvoi en concluant à la non application de la directive 2003/88 aux sapeurs-pompiers volontaires dont les conditions d’emploi excluaient, selon elles, la qualification de « travailleurs » au sens de cette directive. Le droit national précise que cette activité « n’est pas exercée à titre professionnel »« . Mais la CJUE, n’a pas suivi l’invitation de la France ……

Des parlementaires ont posés des questions au sujet des conséquences de l’arrêt Matzak :

  • Le 7 novembre 2017, suite à la parution des conclusions de l’avocate générale, M. Guillaume Kasbarian a posé une question sur la « nécessité de revoir le régime des SPV pour prendre en compte la nécessité de mieux encadrer leur statut tout en maintenant les spécificités du système français« . Réponse en attente.
  • Le 13 février 2018, M. Adrien Morenas a demandé à un ministre « la position du Gouvernement sur cet important sujet afin d’exclure définitivement les sapeurs-pompiers volontaires du champ d’application de la directive« . Réponse en attente.

La Directive européenne sur le temps de travail s’applique aux pompiers volontaires : C’est le titre d’un article paru sur le site du quotidien du droit  (Dalloz). Il est rappelé que «  Les gouvernements successifs ont tout fait pour l’éviter, jusqu’à intervenir devant la Cour de Justice de l’Union européenne dans une affaire que connait la Belgique. Mais le Cour de justice a jugé que les Etats membres de l’Union européenne ne peuvent pas déroger, à l’égard de certaines catégories de sapeur-pompier recrutés par les services d’incendie et de secours, à l’ensemble des obligations découlant des dispositions de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 20003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail« .

Si en droit tout semble très clair, son application ne l’est pas du tout, du moins en France ……

Dès lors, deux questions se posent :

  1. La France, dont l’attachement aux valeurs européenne est affiché, avec ses 66 millions d’habitants et ses 194 000 sapeurs pompiers volontaires (dont un certain nombre de double statut), trouvera-t-elle un chemin pour aller devant l’Europe et demander qu’une directive européenne ne soit pas appliquée qu’à une très faible partie de sa population, tout en conciliant sa position pro-européenne ?
  2. Et quand bien même, elle trouverait cet « étroit » chemin, l’Union européenne, qui défend les intérêts de plus de 700 millions d’européens en matière de santé et de sécurité au travail, va-t-elle faire, pour la première fois une exception et exempter les SPV français de l’application de la directive européenne 2003/88, créant ainsi une jurisprudence pour d’autres domaines ?

Autrement dit, peut-on (en même temps …) être dans l’Europe et en dehors ? A l’évidence non !

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Des conséquences financières importantes, mais pas forcément insurmontables

Depuis la loi n° 2011-851 du 20 juillet 2011 relative à l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires et à son cadre juridique, intégrée au Code de la Sécurité publique, le principe de vacations institué par la loi 96-370 a été maintenu, mais sous le vocable d’indemnités.

Dans la majorité des cas il s’agit d’un droit. Mais pour les astreintes, c’est juste une possibilité et ce, dans la limite de 9 % de la vacation de base du grade de l’agent. Aujourd’hui, l’Europe dit que le temps d’astreinte doit être considéré comme du temps de travail. Dans ces conditions, il ne paraît plus acceptable qu’un travailleur travaille sans être rémunéré.

Mais ce n’est pas tout, le nouveau statut de travailleurs des SPV ouvre la possibilité de comparer leur salaire aux travailleurs (SPP) qui, dans le même SDIS réalisent des missions identiques. Puisque les SPV ont les même diplômes que les SPP, qu’ils participent aux mêmes missions au sein des SDIS, est-il normal qu’ils ne perçoivent pas une salaire similaire, pour le temps passé en intervention, en formation ou encore en astreinte ? Sur ce point, la jurisprudence française et européenne sont unanimes à dire qu’iil ne peut pas y avoir de discrimination.

Au SDMIS les astreintes sont rémunérées pour les officiers, et pour tous les personnels qui assurent les différentes astreintes techniques ou médicales, mais pas pour les sapeurs-pompiers volontaires.

Certains vont peut être tenter d’estimer le préjudice financier subit. Ça sera un très vaste calcul pour lequel il faudra retrouver toutes les périodes susceptibles d’être rémunérées différemment (astreinte, garde postée, interventions, formations, etc …) et leur appliquer un taux de rémunération à déterminer, en fonction de celle des professionnels. A cela, il faudrait déduire les sommes reçues au titre des vacations/indemnités. Et comme la prescription est quadriennale, chaque agent pourrait remonter légitimement au cours de l’année 2018 jusqu’en 2014, et en 2019 jusqu’en 2015, etc ….

Bref, de sacrés calculs dont le montant est difficile à estimer, mais dont ont peut dire qu’il pourraient vraisemblablement varier de quels centaines d’€uros à quelques milliers d’€uros par an et par agent.

Et comme il est très probable qu’une faible partie des SPV iront dans cette direction, finalement la charge annuelle à supporter par le SDMIS, dont le budget annuel est voisin de 180 Millions d’Euros devrait pouvoir absorber cette nouvelle charge.

Mais le SDMIS ne voudra jamais changer de système de rémunération sans que les textes nationaux le permette, et la France ne semble pas pressée. Ceux qui voudront réclamer leur dû, devront s’armer de patience, et très probablement « ferrailler » devant les tribunaux, et peut être même aller jusque devant l’Europe pour faire valoir leurs droits.

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Une question de santé et de sécurité pour les SPV et les SPP

Lorsque l’on évoque la directive européenne 2003/88, il faut toujours se rappeler pourquoi elle a été mis en place. A cet égard, la lecture des considérants en début du texte est primordiale.

Les objectifs sont clairement annoncés :

  • Améliorer le milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs,
  • Promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail,
  • Tous les travailleurs doivent disposer de périodes de repos suffisantes,
  • Il convient de tenir compte des principes de l’Organisation internationale du travail en matière d’aménagement du temps de travail, y compris ceux concernant le travail de nuit,
  • Des études ont démontré que l’organisme humain est plus sensible pendant la nuit aux perturbations environnementales et à certaines formes pénibles d’organisation du travail et que de longues périodes de travail de nuit sont préjudiciables à la santé des travailleurs et peuvent compromettre leur sécurité au travail,
  • Il y a lieu de limiter la durée du travail de nuit, y compris les heures supplémentaires ….

La santé et la sécurité sont donc bien au centre des mesures minimales édictées par la directive européenne 2003/88.

Actuellement les professionnels sont soumis à la directive 2003/88, mais pas les volontaires. Ces derniers peuvent donc travailler, en droit français, aux côtés de professionnels sans avoir les mêmes repos obligatoires prévus par la directive, mettant ainsi en danger leur propre vie, mais également celles de leurs partenaires de travail, lors d’opération telles que la conduite des engins, les sauvetages, etc….

La sécurité individuelle impacte la sécurité collective.

La responsabilité pénale des dirigeants du SDMIS pourrait être engagée et reconnue par un juge qui serait saisi par un agent ou par ses ayant droits, à la suite d’un accident du travail pour lequel un sapeur-pompier aurait travaillé pour le SDMIS sans avoir pu bénéficier de tous les repos prévus par la Directive 2003/88.

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Des conséquences sur le statut des SPV

 

En droit français, les sapeurs-pompiers volontaires ne relèvent pas des dispositions statutaires applicables aux fonctionnaires territoriaux (Loi 84-53), ni des dispositions relatives aux agents non titulaires de la fonction publique (décret 88-145), pas plus que du code du travail.

Le Conseil d’Etat, depuis son avis de 1993, confirmé par un arrêt de 2017, considère qu’ils sont des agents publics contractuels à temps partiels qui exercent, dans les conditions qui leur sont propres, la même activité que les sapeurs- pompiers professionnels.

Selon la Haute Cour Française, les sapeurs-pompiers volontaires, seraient exclus, en principe, de l’application du code du travail et du statut de la fonction publique, compte tenu qu’ils ne sont pas considérés comme des travailleurs.

Or, ce n’est pas la position de l’Europe qui les considère comme des travailleurs.

Alors quelle règlementation doit-on appliquer ?

La réponse provient du Conseil d’Etat qui publie dans un document intitulé « LE JUGE ADMINISTRATIF ET LE DROIT DE L’UNION EUROPEENNE », les propos ci-dessous :

  • « L’effet direct du droit de l’Union a été consacré par la Cour dans l’arrêt Van Gend en Loos du 5 février 1963. Dans cet arrêt, la Cour énonce que le droit européen engendre non seulement des obligations pour les pays de l’UE mais également, à certaines conditions, des droits pour les particuliers, qui peuvent invoquer directement des normes européennes devant les juridictions nationales et européennes ».
  • ……..
  • « S’agissant de l’effet direct du droit de l’Union, par son arrêt Mme Perreux (CE, Ass, 30 octobre 2009, n° 298 348), le Conseil d’Etat a mis un terme définitif aux controverses issues de la jurisprudence d’Assemblée du 22 décembre 1978, Ministre de l’intérieur c/ Cohn-Bendit (n° 11 604) dont la portée avait été progressivement atténuée. Cette décision reconnaît, à l’expiration du délai de transposition, l’effet direct « vertical ascendant » des directives, même non transposées. En vertu de cette jurisprudence, les particuliers peuvent se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, lorsque l’Etat français n’a pas pris, dans les délais impartis, les mesures de transposition nécessaires».

Certes la jurisprudence française a mis 45 ans (2009-1963) pour se mettre sur l’exacte position de l’Europe, mais les choses sont claires en droit Français et Européen : C’est le droit européen qui prime !

Pour autant, cela veut-il dire que tous les SDIS de France, le SDMSI en tête, vont considérer les sapeurs-pompiers volontaires comme des travailleurs, leur appliquer la directive 2003/88, et leur attribuer une rémunération de travailleur plutôt que de leur verser des vacations/indemnités sur lesquelles personne ne paye de charges ? Très certainement pas, compte tenu des premières réactions indiquées ci-dessus.

D’autant que la nature même des contrats est également remis en question (CDD/CDI), tout comme les congés annuels auxquels ont droit tous les travailleurs, les droits à pension, etc…..

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Un possible impact sur la réponse opérationnelle

 

Il ne serait pas honnête de passer sous silence l’impact possible voire même probable de l’arrêt Matzak sur la disponibilité des sapeurs-pompiers volontaires.

En instituant des repos de sécurité obligatoires, interne à la journée (pause), journaliers, hebdomadaires, pour le travail de nuit, etc ….la Directive permet de préserver la santé et la sécurité de tous les travailleurs au travail.

L’Europe limite également la durée du travail à 2256 heures sur une année (47 semaines à 48 heures maximum par semaines, 47 étant la différence entre les 52 semaines d’une année et les 5 semaines de congés annuels règlementaires en France), sans possibilité de dépasser cette limite.

Un SPV travaillant 1607 heures par an chez un employeur (public ou privé),  pourra donner au maximum 649 heures de disponibilité à son SDIS. Il devra également avoir ses 11 heures de repos journalier, ses 35 heures de repos consécutifs hebdomadaire, etc …, tous emplois confondus. Ces repos étant prévus par la directive européenne 2003/88, afin de préserver la santé et la sécurité des travailleurs au travail.

Ces contraintes européennes pour lesquels la France s’était affranchies en construisant l’actuel statut du SPV, vont très probablement limiter la disponibilité du volontariat.

Les SDIS auront plusieurs solutions à leur disposition : mieux utiliser la disponibilité des SPV, recruter des professionnels ou diminuer la réponse opérationnelle.

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